Le Maquis de Lorris

Qu’est-ce qu’un maquis ?

Travail réalisé avec les élèves du Club Résistance 2005-2006 du collège Geneviève de Gaulle-Anthonioz des Bordes, autour du thème du Concours National de la Résistance et de la Déportation : « Résistance et monde rural »

Aujourd’hui encore, le mot même de « maquis » revêt une signification toute particulière. Le maquis, c’est le symbole de la Résistance, de la Libération, un mot devenu emblématique de la lutte clandestine du monde des campagnes pendant la Seconde Guerre mondiale.

A l’origine, le maquis désigne simplement les bois et broussailles typiques de Corse, peu accessibles à l’homme. L’expression « prendre le maquis » fit son apparition à l’été 1943, conséquence directe de la mise en place du STO, le Service du Travail Obligatoire, par les autorités de Vichy. L’obligation de partir travailler en Allemagne amena très vite de nombreux jeunes à envisager de se réfugier dans la campagne, les bois, les montagnes, s’évaporer dans la nature, « prendre le maquis ».  Ces réfractaires constituent d’ailleurs autant de recrues potentielles pour renforcer les effectifs de la Résistance, à condition que les chefs locaux comme les responsables des mouvements prennent la mesure du phénomène et l’encadrent. L’apparition ce ces maquis va pousser Londres et les chefs de la Résistance (comme Henri Frenay) à, d’une part, proposer leur aide pour cacher ceux qui le souhaitent (mais ne désirent pas combattre), et d’autre part à encadrer ceux qui veulent entrer dans une résistance plus active (soit entre 10 et 20% des réfractaires seulement). En août 1943 est ainsi créé un Service National Maquis pour structurer les différents groupes. La crainte est alors réelle de voir ces jeunes se livrer sans contrôle à des opérations désordonnées et finalement contraire aux intérêts de LA Résistance. Les hommes qui composent les maquis sont des clandestins, ils vivent dans l’illégalité, sont certes enthousiastes, mais peu préparés au combat. Les encadrer, cela signifie les nourrir, les armer, les entraîner au combat, les financer, cela ne se fera qu’avec le soutien de Londres, et du monde rural qui rentre alors de plein pied dans la Résistance. Fin 1943, on estime à environ 10000 hommes les effectifs des maquis en zone Nord, 30000 en zone Sud.

Des maquisards de Châtillon-sur-Loire (Droits réservés, coll. particulière, famille Rimbault)

Derrière ce terme de maquis se cachent en fait plusieurs réalités. Il n’y a pas un mais des maquis : des maquis-refuges pour les réfractaires qui ne cherchent qu’à se faire oublier, et des maquis combattants. Et encore faut-il distinguer deux grands types de maquis combattants : les gros maquis dits « mobilisateurs » qui accueillent plusieurs milliers d’hommes et représentent des forces militaires non négligeables (maquis des Glières ou du Vercors), mais aussi des maquis mobiles, des unités d’une trentaine d’hommes en moyenne. Cette organisation répond à deux impératifs, aux forces importantes la charge de fixer les troupes allemandes en les empêchant de rallier les territoires libérés par les Alliés après le Débarquement, aux unités mobiles le soin de harceler l’ennemi, couper ses communications, ce sont les spécialistes de la guérilla.

Un maquis dans la forêt d’Orléans

Travail réalisé en collaboration avec le collège voisin de Lorris et Annick Cassignol, professeur d’Histoire, secrétaire de l’AFAAM, l’Association des Familles et Amis des Anciens du Maquis de Lorris (AFAAM), membre du Conseil historique du Musée de la Résistance de Lorris et chargée de l’élaboration du CD-Rom de l’AERI, l’Association pour des études sur la Résistance intérieure, sur la résistance dans le Loiret

Le Maquis de Lorris, le plus important de la forêt d’Orléans, est un exemple quelque peu atypique dans la mesure où il a été organisé dans le but de former des unités mobiles de part et d’autre de la Loire après le 6 juin 1944, mais qui est devenu un maquis bien plus important au gré d’événements totalement imprévus provoquant le regroupement de plusieurs maquis de la région. A l’été 44, ce sont 500 à 600 hommes qui après un mois de guérilla sur les arrières de l’ennemi se lancent dans la libération du territoire, délaissant l’abri relatif de la forêt pour la lutte au grand jour. A leur actif, la libération d’Orléans aux côtés des Américains, et une participation efficace à la libération de Paris aux côtés de l’Armée Leclerc !

Situation géographique du Maquis de Lorris : importance de la forêt et de la ruralité

La forêt d’Orléans (image Google Earth)

La forêt d’Orléans est un vaste domaine forestier couvrant une étendue de 35000 hectares. C’est un lieu particulièrement attractif pour tous ceux qui voulaient se dissimuler aux vues de l’ennemi : réfractaires au travail en Allemagne, prisonniers évadés, déserteurs des chantiers Todt, songèrent dès 1942 à chercher un abri dans la forêt ou dans des fermes proches de celle-ci. De nombreux jeunes furent ainsi incorporés dans les chantiers forestiers d’Ingrannes et de Lorris et participèrent à des travaux de bûcheronnage pendant quelques mois en attendant un moment favorable pour « résister ». De nombreux responsables des Eaux et Forêts étaient déjà engagés dans des mouvements de Résistance.

Carte du Loiret, David Kalimeris, Les Sangliers sortent du bois, en rouge la localisation du Maquis de Lorris

Dès 1942, il existe au carrefour d’Orléans un chantier forestier qui va accueillir des réfractaires au STO. Situé au nord de la Loire  sur le territoire de quatre communes : Lorris, Montereau, Ouzouer-sur-Loire, et les Bordes. C’était en fait une sorte de vaste rond point vers lequel convergeaient huit routes, des chemins forestiers, formant une grande intersection à la jonction pile des quatre communes des environs. Quatre maisons forestières se dressaient en vis-à-vis deux par deux, une par commune, plus quelques bâtiments annexes qui constituaient le chantier, à l’ombre de magnifiques séquoias géants. C’est le chef Charton qui dirigeait ce chantier de bûcheronnage. Une quinzaine de personnes étaient présentes en permanence, dont le contremaître Pierre Rigolet, les gardes forestiers Renault et Goy avec leurs familles.

Témoignage recueilli et enregistré par les élèves du Club Résistance 2010/2011 du collège Geneviève de Gaulle Anthonioz des Bordes
Bernard Chalopin et Jean Héau, le 11 mai 2011, au collège

Baraquements du chantier

Pendant l'Occupation, de nombreux jeunes étaient incorporés dans les chantiers forestiers de la région où ils participaient à des travaux de bûcheronnage. Certains rejoignirent la résistance. Au Carrefour d'Orléans, rebaptisé depuis Carrefour de la Résistance, un de ces chantiers dirigé par René Charton accueille à partir de 1943 des réfractaires au STO. Dès juin 1944, les volontaires rejoignent au camp des Aulnottes, puis au camp du Ravoir (juillet 1944), les autres maquisards.

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Les baraquements et des bûcherons du chantier, les sequoias géants aujourd’hui (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Le maquis de Lorris bénéficie donc d’une situation privilégiée au cœur de la forêt d’Orléans dans le massif forestier de Lorris. Conjointement, la densité des futaies et la présence de plusieurs sources ainsi que la proximité du chantier forestier installé au Carrefour d’Orléans ont déterminé le choix de l’emplacement du Maquis pour assurer la mission initiale. Cependant, les événements survenus en Juin et Juillet 1944 ont modifié le plan initial et ont conduit à la création d’une force plus  importante que prévu : le maquis de Lorris.

L’équipe du chantier forestier autour du chef Charton (béret noir) (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)
René Charton et Pierre Rigolet (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)
René Charton et Pierre Rigolet (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Les origines du maquis

La complexe mise en place d’un maquis dans le Loiret Le Maquis de Lorris comme pour la plupart des maquis a connu une mise en place très complexe, avec de nombreux intervenants. La spécificité du Maquis de Lorris réside dans le fait qu’entre 1942 et 1943, il est passé d’une organisation clandestine cachée dans un …

L’entrée en Résistance

Les effectifs Le Maquis de Lorris comprenait des volontaires, des réfractaires au STO, des Anglais venus du Maquis de Chambon (5 ou 6), des volontaires Arméniens et Algériens, des incorporés de force dans la Wehrmacht (Polonais, Serbes, Russes) ainsi que quelques résistants venus des Maquis de l’Yonne  et les mobilisés de force de Lorris. Laissons nos …

Une évolution imprévue

Des « Aulnottes » au « Ravoir », une évolution dictée par les circonstances C’est donc Albin Chalandon qui est à l’origine de ce premier camp, près du carrefour d’Orléans. Ce camp, au confort tout relatif, est une base d’entraînement militaire de FFI, en attente d’accomplir des actions contre les troupes ennemies venant du sud de la Loire. Serge …

L’organisation du camp

La vie au camp Un peu à la surprise générale, O’Neill nomme son adjoint, Benjamin Passet à la tête du Maquis de Lorris, alors que son fondateur, Albin Chalandon, se retrouve responsable de la seule Compagnie Albin. Pour suppléer Albert et prendre le commandement de la seconde compagnie, on parachute depuis Londres un nouvel officier, …

Les maquisards en action

Nos résistants une fois regroupés, organisés, formés et armés, peuvent enfin passer l’action. Il faut distinguer deux périodes concernant le maquis de Lorris. Les opérations de guérilla menées depuis la forêt d’Orléans contre les Allemands après le débarquement du 6 juin 1944, et les opérations de libération du territoire au lendemain de l’assaut allemand contre …

L’affaire Solterre

Travail réalisé en collaboration avec Marie-José et Jean-Pierre Vallot-Meert, auteurs du recueil « François Meert, fermier du château de Solterre, un grand résistant de la guerre 1939-1945, oublié par l’histoire », rédigé et mis en page en 2009 à partir des documents compulsés aux Archives nationales du service historique du Ministère de La Défense, aux Archives départementales …

L’embuscade de Chicamour

Que s’est-il passé le 12 août 1944 à Chicamour ? Rappelons tout d’abord le contexte : Suite à l’attaque du maquis de Vitry-aux-Loges le 17 juillet, puis celui de Chambon le 6 août, ce sont 3 compagnies qui s’organisent au camp du Ravoir, soit à ce moment-là environ 450 hommes. Alors que les Américains approchent de la région, …

L’attaque du 14 août 1944

Le 14 Août au matin, l’armée allemande encercle le carrefour d’Orléans, pensant y trouver le camp du maquis. Il s’agit du régiment de sécurité 1010, chargé particulièrement d’éradiquer les poches de résistance en France. Originaire de Dampierre-en-Burly, Charles Léger intègre le maquis de Lorris au printemps 1944 dans la compagnie Robert. Il se distingue lors de …

Les combats de la Libération

Direction Orléans Du fait de l’attaque du 14 août, c’est l’armée Patton qui libéra seule Orléans, sans la participation pourtant prévue du Maquis de Lorris. L’arrivée des maquisards à Orléans ne s’est faite que le 17 Août. Mais au passage, les combattants du maquis participèrent à la libération de Châteauneuf-sur-Loire ainsi qu’aux combats de Fay-aux-Loges. Rappelons …

Les maquisards à Paris !

Une mission non prévue : la participation à la Libération de Paris  C’est le Colonel O’Neill qui prend la décision de monter sur Paris. Le 23 août 1944 au soir, de retour des combats au sud de la Loire, les maquisards préparent leur départ pour Paris. Les Compagnies Albin et Paul partent à 8 heures le lendemain matin …

bibliographie

Au temps de l’héroïsme et de la trahison, Paul Guillaume, Librairie Loddé, 1978 Le Maquis de Lorris, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris Le Gâtinais en résistance, A l’Est du Loiret au temps des maquis, Liliane Brulez, Corsaire éditions, 2024 Le Loiret dans la guerre, Yves Durand, Editions Horvath 1983 …