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À nos anciens disparus

Chaque année, l’Assemblée générale de l’AFAAM est l’occasion de rendre un dernier hommage aux anciens maquisards disparus récemment. Depuis quelques années, ils sont malheureusement nombreux à nous avoir quittés. Cette rubrique ne peut être exhaustive, il s’agit avant tout de mettre en lumière le rôle d’hommes particulièrement engagés, au sein de l’AFAAM comme auprès des jeunes pour lesquels ils ont témoigné sans relâche de leur expérience pendant toutes ces années, à l’image d’Étienne Girard ou Jean Héau.


Le général Paul Renaud, 98 ans, est décédé le vendredi 19 mai 2023

Paul Renaud, maquis de Lorris ,Tous droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris

Né en 1925, Paul Renaud fait partie des fameux Cyrards, ces étudiants de l’école militaire de St Cyr, engagés auprès des maquisards de Lorris pour les former, malgré leur jeune âge. Paul Renaud prendra part aux plus durs combats de l’été 1944, à Chicamour le 12 août 1944 notamment. Il sera également en première ligne lors de l’attaque du maquis le 14 août 1944 comme lors de l’assaut sur la chambre des députés à Paris le 25 août !

Après ses années au maquis, comme il le dira lui-même, « j’y ai trouvé tout naturellement le point de départ pour ma carrière d’officier puisque j’ai été dirigé ensuite sur l’école militaire de Saint Cyr qui était repliée à Cherchel en Algérie. ».

Paul Renaud poursuivra ainsi une brillante carrière militaire. En janvier 1946, direction l’Indochine, où il restera en poste jusqu’en juillet 1949. Je vous recommande à ce propos la lecture de son témoignage, « Souvenirs d’Indochine », sur le site du Souvenir Français, récit duquel transpire toute sa passion pour cette région du monde, la « Perle de l’Extrême-Orient ».

Devenu par la suite général de brigade à l’état-major des Armées, Paul Renaud est Commandeur de la Légion d’honneur, Commandeur de l’ordre national du Mérite, il reçoit également la croix de guerre 1939-1945, la croix de guerre des Théâtres d’opérations extérieurs, ainsi que la croix de la Valeur militaire.

Qui mieux que lui peut raconter cette expérience inoubliable vécue par ces jeunes patriotes, bien souvent inconscients des risques encourus au moment de leur engagement ! A seulement 19 ans en 1944, Paul Renaud a tout de même ce début de formation militaire qui lui permettra d’instruire les inexpérimentés maquisards de Lorris.

Je vous laisse donc découvrir son histoire, il s’agit d’un montage de deux témoignages faits à différents moments dont une conférence à Lorris en 2014, et qui permettent de balayer toute la période d’engagement de Paul Renaud, il était l’une des toutes dernières voix du maquis de Lorris…

Mon engagement au maquis de Lorris

En septembre 1939, j’avais 14 ans, j’étais collégien en « seconde » à Angers. C’est là que j’ai assisté en mai 1940 à la « débâcle » : l’exode des réfugiés par milliers sur les routes et la défaite d’une armée désorganisée. Nous étions réfugiés à la campagne quand les troupes allemandes victorieuses sont arrivées et ont campé dans le parc de la propriété que nous occupions.

Cette défaite, le contraste entre les soldats allemands et les nôtres, le pays désorganisé, ont blessé, humilié déjà l’adolescent que j’étais alors et ont entraîné chez moi un profond désir de revanche.

En 1942, notre famille s’est installée à Paris occupée, et je suis entré dans une classe commerciale camouflant une préparation à ce qui devrait être un jour le concours de St Cyr : on nous appelait déjà les « cyrards ».

Fin 1943, nous avons été contactés par un membre de l’O.R.A. (Organisation de la Résistance de l’Armée) et nous nous sommes réunis alors périodiquement à une dizaine pour des séances d’instruction ou pour des liaisons en attendant le moment d’intervenir.

L’évènement, ce fut le débarquement du 6 juin en Normandie et, pour nous, le début de l’aventure. Plusieurs membres de notre réseau de l’O.R.A. sont alors arrêtés en déportés. Deux jours après, j’apprends par un camarade que nous devions rejoindre sans délai la forêt d’Orléans : dans la clandestinité, on ne demande pas de précisions, on fait confiance à un agent dont on ne connait même pas l’identité mais un prénom … Et le lendemain, sac au dos comme si nous allions chercher du ravitaillement à la campagne, nous prenons à deux ou trois le train, les uns pour Montargis, d’autres pour Orléans, moi pour Briare avec une bicyclette. Après de bonnes marches de jour et de nuit nous nous retrouvons tous – nous étions 23 dans ce cas- à un chantier de bûcheronnage installé au grand carrefour devenu le carrefour de la Résistance, accueillis par l’héroïque Monsieur Charton qui sera fusillé le 14 août et celui qui deviendra notre chef, Albin.

Nos missions sont alors réparties : certains rejoignent les maquis déjà formés de Vitry-aux-­Loges et de Chambon et pour ma part je participerai comme dix de mes camarades à l’encadrement de jeunes de mon âge qu’il s’agira le moment venu de mener au combat… Dans ce qui sera le maquis de Lorris.

Nos rapports avec la population étaient très bons les « collabos » étaient montrés du doigt : c’était évidemment le début de la libération, mais les fermiers qui nous cachaient, les forestiers etc… prenaient beaucoup de risques.

La région, sillonnée de troupes allemandes qui affluaient du Sud vers la Normandie, connaissait une certaine ébullition, en soulèvement contre l’envahisseur, et les jeunes contactés de bouche à oreille rejoignaient en masse la Résistance, comme les patriotes volontaires de 1792 : c’est ainsi que les jeunes de Thimory constituèrent mon groupe de combat tandis que ceux de Nogent sur Vernisson, Montereau, Noyers, Vieilles-Maisons ou du Moulinet formaient les autres groupes dans un élan magnifique.

Pendant la période de formation du maquis, les « cyrards » sont accueillis chez des agriculteurs courageux qui les reçoivent malgré les risques encourus, comme des jeunes de ce qui s’appelait alors le « service civique rural », mais ils n’avaient aucune illusion sur ce que nous étions venus faire ! Je suis reçu pour ma part d’abord à la Girardière puis, avec mon camarade Pierre Puget qui sera tué à Chicamour le 12 août, à la Gironnière chez monsieur Beauvais, dont la fille Gisèle épousera plus tard un maquisard, Jean Heau.

Nous avons bien biné quelques betteraves mais nous passions la plupart du temps en forêt, du côté de la Noue Mazone ou ailleurs, creusant des caches pour les armes à venir, réunissant nos groupes de combat, prenant liaison avec notre chef Albin à la ferme du Barnabé sur la route de Sully, beaucoup de déplacements à pied ou à bicyclette…

Un soir, le 21 juin, nous sommes alertés pour notre premier parachutage, annoncé à la BBC. Regagnant une grande clairière par des chemins détournés, nous disposons hâtivement un balisage de bottes de paille à allumer le moment venu et c’est l’attente dans le silence de la nuit. Au loin on entend les bruits sourds d’un bombardement du côté d’Orléans. Tout à coup, un ronronnement grandit, s’approche puis s’éloigne : un gros avion, échappé probablement du raid de bombardement que nous entendions… Nous nous précipitons pour allumer les bottes qui doivent guider l’appareil qui, brusquement débouche à basse altitude, largue son chapelet de parachutes et disparaît : chapeau les pilotes de la RAF ! A l’émotion succède une activité fébrile pour dégrafer les containers de leur parachute, certains sont accrochés haut dans les arbres, charger ces lourds containers sur des charrettes à cheval, les conduire à nos caches, et tout cela avant le jour et la reconnaissance quotidienne du petit avion d’observation allemand qui surveille la région.

Je suis rentré ce jour-là assez tard, épuisé, prendre mon sac, dire adieu à la Gironnière et regagner la forêt. A partir de ce moment-là « Thimory » est regroupé en bivouac sous les tentes de parachute, dégraisse les armes et mène les opérations qui le mèneront jusqu’à Paris : aucun ne faillira.

Ces fermiers qui nous recevaient, ces jeunes volontaires de juin 44 qui s’engageaient pour la libération du pays, peuvent être fiers de l’exemple qu’ils ont donné et je m’honore de leur amitié.

Les activités du « maquis » : Nous montions des embuscades sur les routes qu’empruntaient les allemands qui remontaient du Sud de la France vers la Normandie, de nuit pour échapper à l’aviation alliée. Nous opérions aussi des destructions de voies ferrées à l’explosif. Nous dormions plutôt de jour et agissions par petits groupes de nuit, mis en place par camion réquisitionné, souvent pour rien, mais quand nous « accrochions », nous « décrochions « rapidement.

Bien repérés par les Allemands nous avons été finalement attaqués le 14 août, et avons dû décrocher à notre tour… Un monument est élevé en forêt d’Orléans au « carrefour de la Résistance » pour commémorer toute cette épopée : 40 tombes y sont regroupées.

Quelques jours après, nous sommes sortis de la forêt pour libérer quelques villages et faire la jonction avec les Américains à Orléans. C’est de là que nous avons rejoint la 2ème DB du Général Leclerc qui montait sur Paris : nous y avons été engagés là le 25 août à l’Ecole Militaire et, en ce qui me concerne, à la chambre des députés, perdant encore six camarades tués devant ces centres de résistance occupés par les allemands.

J’avais 19 ans en 1944 : je retiens la satisfaction d’avoir pris une revanche sur l’humiliation de mon pays, qui m’avait tant marqué, blessé adolescent. Et cette aventure a été menée dans la camaraderie et l’enthousiasme.

Le général Renaud au Carrefour de la Résistance, AFAAM, 2007 (source:https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Paul_Renaud,_2007.jpg)


Bernard Chalopin (décédé le 4 septembre 2022)

Bernard Chalopin (Tony) (Droits réservés, Famille Chalopin)

Bernard Chalopin était bien LA voix des anciens du maquis, le représentant de tous ses camarades, le Président d’honneur de l’AFAAM, mais il était aussi un ambassadeur de Mémoire pour les jeunes, celui qui inlassablement témoignait de l’histoire de ce Carrefour au cœur de la forêt d’Orléans, de ces jeunes engagés dans une guerre d’usure contre l’occupant allemand, Il témoignait de cette histoire que je suis bien incapable de transmettre en tant que simple enseignant, car seuls ceux qui ont vécu les événements sont légitimes pour le faire comme il se doit. Nous n’étions que trop conscients ces dernières années de cette forme d’urgence qu’il y a à permettre aux nouvelles générations de profiter du récit de celles et ceux qui ont affronté la barbarie nazie, et que nous voyons dramatiquement disparaître les uns après les autres. Combien de fois au collège a-t-il pris ce temps que les programmes scolaires ne permettent plus depuis longtemps pour expliquer, raconter, à des générations d’élèves, l’histoire de ces résistants, et ce depuis près de 20 ans en ce qui concerne le collège des Bordes. Sa disponibilité, sa gentillesse et son humour n’ont jamais été oubliés par tous ceux qui ont croisé son chemin.

Je ne vous referai pas ici sa petite fiche « biographique », son entrée à l’OCM le 15 décembre 1944 à 17 ans, sa volonté d’honorer son père, un ancien de la guerre de 14, l’entraînement militaire, les premières missions dans sa compagnie aux Aulnottes puis au camp du Ravoir, la libération de Paris… l’estafette « Tony » a fait sa part. Bernard est présent sur toutes les pages consacrées au maquis de Lorris sur ce site, et aborde dans de courtes vidéos tout son parcours finalement classique tout en restant exceptionnel, celui d’un jeune homme de son temps qui a su dire NON à l’invasion de son pays par une puissance étrangère.

Il nous reste de notre Bernard des milliers de souvenirs (la remise de sa décoration le 18 juin 2021 restera un moment très fort), et des centaines d’anecdotes, tragiques, souvent, mais parfois cocasses également, on ne se lassait jamais de son récit de la réquisition de la traction du curé de Varennes ! Il nous reste des dizaines d’heures de vidéos grâce auxquelles d’autres générations d’élèves qui n’auront pas la chance de le rencontrer pourront tout de même s’informer, en classe comme sur ce site, et découvrir les activités du plus important maquis du centre de la France en 1944.

Le plus dur commence maintenant, perpétuer, sans notre ancien emblématique, la Mémoire de la Résistance, de manière à ce qu’elle ne tombe jamais dans l’oubli, la tâche est immense.


Albin Chalandon (décédé le 29 juillet 2020)

Pour les jeunes qui parcourent ce texte et ne connaissent pas Albin Chalandon, il débute sa carrière après la guerre à l’Inspection générale des finances avant de poursuivre dans la haute fonction publique et les directions d’entreprises. Ministre de l’Industrie du gouvernement Georges Pompidou en 1968, Ministre de l’Équipement et du Logement des gouvernements Maurice Couve de Murville (juillet 1968 – juin 1969) et Jacques Chaban-Delmas (juin 1969 – juillet 1972), il est élu député dans le Nord lors des élections législatives de 1986, avant d’être nommé garde des Sceaux du gouvernement de Jacques Chirac (mars 1986 – mai 1988). Je ne reviendrai pas ici sur cette brillante carrière dans les finances et la politique, abondamment détaillée sur le web, mais bien sur le parcours qui l’a amené à fonder le maquis de Lorris en 1944.

Albin Chalandon est né le 11 juin 1920 à Reyrieux dans l’Ain, c’est là qu’il passe les premières années de la guerre dans la propriété familiale, avant de s’installer à Paris après 1942 et l’invasion de la zone libre par les troupes d’occupation allemandes. Après avoir fait ses classes au lycée Condorcet, il obtient une licence en lettres à la faculté des lettres de Paris et un diplôme d’études supérieures en philosophie. Il prépare alors le concours de l’inspection des finances au cours de l’année scolaire 1942-1943 (il sera finalement reçu au concours après la guerre, en avril 1945). Le jeune homme de 24 ans est à ce moment remarqué et recruté par une connaissance pour intégrer une organisation militaire clandestine, l’Organisation de résistance de l’Armée, ou ORA. En juin 1943, l’ORA vient de reconnaître la légitimité et l’autorité du général de Gaulle et entreprend de coordonner ses actions avec d’autres mouvements de résistance, en créant des maquis ou des groupes armés, encadrés par des officiers ou anciens officiers de l’armée. Parmi eux, le lieutenant Jean de Montangon, officier de carrière et instructeur à Saint-Cyr à Aix-en-Provence. Il créé le Corps-Franc Liénart, prend sous son aile Albin Chalandon et commence le recrutement des « Cyrards » qui quitteront la capitale pour enseigner l’art de la guerre aux maquisards du Loiret, des Cyrards dont je vous invite à découvrir le parcours plus bas sur cette page en relisant et écoutant le témoignage de l’un d’entre eux, André Plagnol.

Jean de Montangon est malheureusement très vite arrêté par les Allemands au printemps 1944 lors d’une réunion à laquelle Albin Chalandon n’assiste pas, laissant donc seuls ce dernier et la vingtaine de cyrards déjà recrutés. Albin Chalandon, sans ordres d’un quelconque supérieur, prend alors l’initiative de créer un maquis au cœur de la forêt d’Orléans, suite à une simple discussion avec un ami parti alors s’y réfugier, Alain D’Anterroches. Nous sommes le 5 juin 1944. Il trouve refuge au lendemain du débarquement dans une ferme à Lorris au lieudit « Les Barnabés », en lisière de la forêt d’Orléans, ferme tenue par la famille Elise d’origine belge. Je laisse Albin Chalandon vous expliquer en personne la suite et la fondation du maquis, c’est un extrait tiré de son témoignage recueilli en 2014 au Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris, aux côtés d’André Plagnol, pour le 70ème anniversaire du maquis et de la Libération de la France. Un grand merci de nouveau à l’équipe du Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris qui nous autorise à diffuser cet enregistrement :

Albin Chalandon, Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris, janvier 2014 (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris)

Albin Chalandon compte ensuite rejoindre le Carrefour d’Orléans et son chantier forestier où il espérait s’implanter, grâce à l’aide des services des Eaux et Forêts et de gardes forestiers tels M. Arrighi et M. Boussogne. En outre, les premiers contacts sont également pris avec les groupes locaux existants, placés sous l’autorité du Lieutenant-Colonel Marc O’Neill, alors Délégué militaire régional de la région P2 et basé dans la ferme de la Folie à Vitry-aux-Loges, mais qu’Albin Chalandon ne connaît pas encore. Marc O’Neill étant responsable de quatre départements dont le Loiret (avec le Nord du Cher, le Loir-et-Cher et l’Eure-et-Loir), Albin Chalandon va donc intégrer son maquis naissant à un ensemble déjà en place (voir la page sur les origines du maquis pour le détail de tous ces événements). Le premier camp du maquis est installé au lieu-dit « les Aulnottes », et les Cyrards recrutent des groupes de 10 hommes dont chacun prend la tête, deux groupes formant plus tard une section (voir schéma d’organisation d’une compagnie). Ce n’est qu’après les attaques successives par les Allemands des maquis de Chambon-la-Forêt puis Vitry-aux-Loges les 17 juillet et 6 août 1944 que se réuniront les trois groupes, formant désormais trois compagnies (voir schéma d’organisation du maquis), une organisation très lourde a parfois regretté Albin Chalandon, ne serait-ce que par la complexité de parvenir à nourrir plus de 500 hommes en pleine forêt et dans la clandestinité ! Si Albin Chalandon est bien le fondateur du maquis de Lorris, son supérieur Marc O’Neill confie le commandement des trois nouvelles compagnies à Benjamin Passet dit capitaine Albert, son plus proche adjoint jusque-là, laissant bien entendu à Albin Chalandon le commandement de son groupe qui devient la compagnie Albin. Le camp des Aulnottes s’avère alors trop petit pour accueillir tant d’hommes, et le 27 juillet, après le survol par un avion de reconnaissance allemand du lieu de rassemblement du maquis, Albin Chalandon organise le « déménagement » au camp dit du « Ravoir » quelques centaines de mètres plus loin.

 S’en suivront les événements que vous connaissez tous, l’organisation des nombreuses missions au sein du maquis et les divers combats de la Libération. Albin Chalandon gardait particulièrement en mémoire l’embuscade de Chicamour au cours de laquelle mourrait Pierre Puget, un jeune cyrard qu’il avait fait venir de Paris, atteint d’une balle en plein front et mort dans ses bras. Albin Chalandon participe aux côtés de ses hommes aux combats du 14 août, mais est victime peu après d’un accident au volant d’une traction avant réquisitionnée. Blessé sérieusement à la tête (voir photo ci-dessous), il enchaîne péniblement avec les combats de la libération de Châteauneuf-sur-Loire et Orléans, jusqu’à la libération de Paris, et plus particulièrement à celle du Parlement et des bâtiments du Quai d’Orsay. Ce fait d’armes lui vaudra la Légion d’honneur à titre militaire (également titulaire de la croix de guerre 1939-1945, il sera élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur le 14 juillet 2009).

Albin Chalandon (au centre avec le bandage) et le groupe Cordier, Paris, août 1944 (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Après les combats à Paris, Albin Chalandon restera aux côtés du colonel O’Neill à Paris jusqu’au début du mois de septembre 1944, alors que le maquis est dissous.

Pour finir, je vous laisse une nouvelle fois avec ces mots d’Albin Chalandon, écrits à l’occasion de la sortie des Sangliers sortent du bois en 2011, ouvrage pour lequel il avait très gentiment accepté d’écrire la préface dont voici quelques extraits :

Le maquis de Lorris ? C’est d’abord, une aventure se déroulant entre quelques centaines d’hommes, aussi passionnante à narrer qu’à vivre. C’est en outre – et bien au-delà – un fragment si minuscule soit-il, de l’histoire de France ! Une nation, écrit Renan, est la volonté de ses membres de vivre ensemble, appuyée sur la mémoire d’un passé commun, et sur un projet pour l’avenir : le maquis de Lorris qui appartient à notre histoire nationale en est un modèle réduit.

L’initiative de faire ce livre plus encore sa réalisation sont exemplaires. La valeur des actes nombreux et salvateurs sur l’ensemble du territoire national, les risques pris par les acteurs notamment celui d’être fusillés pour quiconque tombait entre les mains de l’ennemi, révèlent l’ampleur du sacrifice et le dévouement total à la nation que la Résistance révéla alors aux Français. En nourrir la mémoire de la population fait partie des forces universelles de l’esprit qui seules peuvent écarter la France de sombrer un jour dans une société de consommation, sans mémoire du passé, ni perspective d’avenir, cessant alors d’être une nation.

Plus encore, la valeur emblématique, lourde de symboles, de la vie des maquisards engagés dans une expérience humaine extraordinaire, donnait au pays l’exemple d’une action consensuelle dans le courage et parfois l’héroïsme. Elle portait en elle-même les traits d’une citoyenneté idéale, reposant sur la liberté, l’égalité, vécues et cette fraternité, que tout maquisard l’ayant éprouvée ne peut que l’espérer toute sa vie.

À la différence d’autres maquis, le maquis de Lorris, n’était d’aucune obédience politique. Le combat n’y eut d’autre objet que de bouter l’ennemi hors de nos frontières. Tout cela exigea une vie simple, sereine et dépouillée, éclairée par les bienfaits d’une communauté où chacun avait le sentiment de vivre en harmonie et en pleine solidarité les uns des autres. Cette qualité de vie, qui accompagna cet état d’esprit, doit être mise en exergue dans toute histoire ou réflexion sur le maquis et le maquisard. Ce dernier, « homme nu » dans la forêt, séparé de toute société, autre que la sienne, révèle une aptitude à se dépasser constamment soi-même et créer les nouvelles formes de rapports humains. Les membres d’une société avancée comme les nôtres ont besoin de savoir ce que devient et comment fonctionne la communauté physique et morale d’un maquis. 

La vie éphémère des maquis, et leur volonté de vivre cachés, nous empêche de saisir leur magie. Ils doivent révéler leur secret. Ce n’est qu’en développant la recherche à leur égard et par conséquent en multipliant enquêtes et témoignages reçus que l’on pourra aider nos propres sociétés à retrouver au fond d’elles-mêmes les ressources ignorées du bonheur. Les auteurs de ce livre ont donné l’exemple ; beaucoup d’autres doivent le suivre.

Albin CHALANDON


Robert Gérard (décédé le 17 juillet 2020)

C’est un des derniers représentants du maquis qui part à son tour. Robert Gérard, alias « Gamin », est né en 1926. Il entre dans la Résistance en février 1944, et se retrouve intégré au maquis de Chambon-la-Forêt début avril. Le groupe est alors dirigé par le capitaine Pierre Gramond lorsque les Allemands attaquent violemment le maquis le 6 avril. Les maquisards ainsi délogés rejoignent le maquis de Lorris dont ils vont constituer la 3ème compagnie, la Compagnie Paul, toujours sous les ordres du capitaine Gramond.

Robert Gérard participe bien sûr par la suite à tous les événements marquants de l’été 1944 aux côtés de ses camarades, les combats du 12 août 1944 à Chicamour, puis ceux du 14 août au Carrefour d’Orléans, la libération de Châteauneuf-sur-Loire, d’Orléans, et enfin Paris.

A la dissolution du maquis, comme bon nombre de ses camarades, et malgré ses 18 ans à peine, Robert Gérard entre alors au 95ème régiment d’infanterie stationné à Briare, jusqu’à la fin de la guerre.

Ancien porte-drapeau du Maquis de Lorris, Robert Gérard est décoré de la Croix du combattant volontaire de la Résistance et représentera tous ses compagnons d’armes aux cérémonies de commémoration annuelles pendant des années. Le 11 août 2019, il est ci-dessous entouré de ses camarades Robert Turpin et Bernard Chalopin pour sa dernière participation aux cérémonies du mois d’août, à l’occasion du 75ème anniversaire des combats du maquis de Lorris, cérémonie au cours de laquelle il reçoit avec eux une médaille commémorative pour marquer cet anniversaire particulier.

Nous garderons le souvenir d’un homme d’une gentillesse et d’une modestie à toute épreuve qui manquera beaucoup à tous les amis des anciens du maquis.


Jacques Blain (décédé le 20 juin 2020)

C’est toujours avec beaucoup de tristesse que nous voyons nos anciens nous quitter. Parmi eux, Jacques Blain tenait une place à part. Toujours disponible auprès des jeunes, il s’est beaucoup investi pour transmettre son histoire, celle des maquisards de Lorris. Jamais avare d’anecdotes, souvent drôles, parfois plus tragiques, il savait captiver son jeune auditoire ! Nul doute que ces élèves qu’il a ainsi côtoyé toutes ces années ne l’ont pas oublié et ne l’oublieront pas…

Jacques Blain est né le 6 avril 1924 à Gien. Comme bon nombre de ses futurs camarades maquisards, il travaille alors dans une ferme comme charretier en 1939. Le jeune Jacques a alors 17 ans. Les événements se précipitent pour lui à l’automne 1942, alors que l’échec de la Relève pousse les Allemands à envisager le recrutement forcé d’hommes pour travailler en Allemagne. Jacques Blain est monté à Paris et travaille aux chemins de fer, il peut être concerné et décide de prendre les devants et de s’engager dans l’armée d’armistice, à 18 ans tout juste ! Ni une ni deux, voilà le jeune garçon qui obtient un laissez-passer pour la zone libre et incorpore le 3ème régiment de hussards à Châteauroux. Le 2ème classe Blain signe donc pour trois ans le 23 septembre 1942, sous le statut d’engagé volontaire provisoire. Il est prévu qu’il intègre le 3ème régiment de Spahis à Batna en Algérie, mais les Alliés lancent l’Opération Torch en novembre 1942 et débarquent en Afrique du Nord : aussitôt les Allemands envahissent la zone libre et démobilisent les soldats français ainsi désarmés. Jacques Blain n’a donc d’autre choix que de retourner à Lorris travailler dans les fermes environnantes ! Menacé cette fois par le STO qui se met en place à compter de février 1943, je laisse M.Blain vous expliquer lui-même dans ce court extrait vidéo comment il intègre la résistance et le maquis de Lorris ! Il rencontre ce jour-là des élèves du collège Geneviève de Gaulle-Anthonioz des Bordes venus à Lorris lui poser leurs questions. Jacques Blain y répondra volontiers tout l’après-midi en compagnie de son frère d’armes Charles Léger et sa fille Annie.

Témoignage recueilli et enregistré par les élèves du Club Résistance 2005/2006 du collège Geneviève de Gaulle Anthonioz des Bordes
Jacques Blain et Charles Léger, 17 mars 2006, Lorris

Incorporé dans la compagnie Albin fin juin 44, dans le groupe dirigé par Jacques de Veyssière, Jacques Blain adopte comme pseudonyme « Le Hussard », évidemment en référence à son court engagement dans l’armée. Son groupe (voir schéma d’organisation d’une compagnie du maquis de Lorris) participe à toutes les actions du maquis. Jacques Blain fait ainsi partie des renforts envoyés l’après-midi du 12 août 1944 à Chicamour, et sera pleinement engagé dans les combats du 14 août au Carrefour d’Orléans. Avec tous les hommes de la compagnie Albin, Jacques Blain participera bien sûr également à la libération de Châteauneuf-sur-Loire, d’Orléans, et enfin Paris et ses combats sanglants pour la prise de la Chambre des Députés et du Ministère des Affaires Étrangères

Après la dissolution du maquis en septembre 1944, Jacques Blain retourne chez lui avec le sentiment du devoir accompli, mais l’Armée n’a pas oublié l’engagé volontaire Blain ! Il est rentré depuis 6 jours à peine qu’il reçoit l’ordre de rejoindre à Strasbourg le 23ème Régiment d’Infanterie de la  1ère armée, constituée exclusivement d’Alsaciens de l’armée allemande (les fameux « Malgré  nous ») et d’anciens maquisards. Et le voilà reparti pour de nouvelles aventures !

Comme ses camarades Charles Léger, Jean Héau, Bernard Chalopin, Robert Turpin, Pierre Benoist, Robert Gérard et tous les autres, Jacques Blain participait à toutes les commémorations et cérémonies du maquis auprès de ses camarades, et intervenait régulièrement auprès des collégiens des environs, nous lui devons beaucoup…

Charles Léger, Jacques Blain et Bernard Chalopin, visite du Carrefour de la Résistance et du camp du Ravoir avec les élèves du collège Geneviève de Gaulle-Anthonioz des Bordes, 17 octobre 2006 (Tous droits réservés)

Michel Noël du Payrat (décédé le 5 mai 2020)

Nous avons appris avec tristesse le décès du général Michel Noël du Payrat, le 5 mai dernier. Il était l’un des derniers « Cyrards » venus de Paris pour instruire les maquisards du Loiret au maniement des armes. Né le 29 novembre 1925 à Paris, Michel Noël du Payrat intègre donc lui aussi la préparation au concours d’entrée à Saint Cyr au Lycée Janson de Sailly à Paris, et suit le même parcours qu’André Plagnol et leurs camarades dont vous retrouverez le détail quelques lignes plus bas : intégré au Corps Francs Liénart créé par le lieutenant Jean de Montangon, c’est à Paris que les jeunes fourbissent d’abord leurs armes et s’initient au maniement des explosifs. Si l’objectif initial était de les préparer à encadrer des équipes pour libérer à terme la capitale, l’arrestation de leur chef le 3 juin 1944 pousse Albin Chalandon, alors adjoint du lieutenant de Montangon, à envoyer les 21 jeunes dans le Loiret en forêt d’Orléans pour y recruter et former de nouveaux volontaires. Michel Noël du Payrat y partagera le quotidien de ses hommes, une vie à la dure dans les bois sous les intempéries, et les risques, au cours des nombreuses missions menées par le maquis. Mais au moment de l’attaque du maquis le 14 août au Carrefour d’Orléans, Michel Noël du Payrat est gravement malade. Souffrant d’une pleurésie (de l’eau dans les poumons), il doit être évacué vers Vitry-aux-Loges. Traqués par les Allemands, les maquisards se replient à travers la forêt, un calvaire pour le jeune homme. Le 16 août à 22 heures, tout le maquis est enfin regroupé sur la route de Fay-aux-Loges, à hauteur du gué Girault, prêt à poursuivre la lutte. Tandis que le maquis de Lorris livre alors combat au grand jour, participant activement à la libération de Châteauneuf-sur-Loire puis Orléans, Michel Noël du Payrat restera un mois à se soigner et se remettre, sous la protection de la famille du garde forestier M.Dutaut. A son plus grand regret, il ne pourra donc pas accompagner ses camarades pour les combats de la libération de Paris.

Après la libération, Michel Noël du Payrat entame une brillante carrière militaire et sera de tous les théâtres d’opérations : Indochine, AOF, Algérie, il est admis à l’Ecole supérieure de guerre en mai 1961 et devient chef de bataillon en 1962. Il fait partie de l’état-major particulier du général de Gaulle entre juillet 1966 et juillet 1968 avant de prendre le commandement du régiment de marche du Tchad. Affecté au cabinet du Premier ministre en août 1975, il est nommé général de Brigade en mars 1977, général de division en 1980, sous-chef d’état-major des armées en 1981, puis général de corps d’armée (inspecteur général des forces extérieures et des troupes de Marine jusqu’en novembre 1985). Élevé au rang de commandeur de la Légion d’honneur, le général Michel Noël du Payrat nous a quittés à l’âge de 94 ans, on n’oubliera pas son rôle dans la création et l’organisation du maquis de Lorris.


Pierre Benoist (décédé le 22 avril 2020)

C’est avec tristesse que nous avons appris le décès d’un autre de nos maquisards dernièrement, Pierre Benoist.

Pierre Benoist est né le 17 décembre 1925. C’est comme réfractaire au STO en Seine et Marne qu’on le retrouve à 19 ans en pleine occupation. Il parvient à échapper à la réquisition et au départ pour l’Allemagne pour se réfugier en forêt d’Orléans. Le voilà donc en juin 1944 aux premières loges pour intégrer le maquis de Lorris où il prend le pseudonyme de « petit Benoit » dans la compagnie Albin sous les ordres d’Albin Chalandon. Il participe donc comme tous ses camarades aux divers combats du mois d’aôut 1944 que vous connaissez tous désormais, à Chicamour le 12, puis autour du Carrefour d’Orléans le 14 août. Pierre Benoist participe également bien sûr à la libération de la Ville d’Orléans puis à celle de Paris, aux côtés de ses camarades.

Fidèle au poste à chaque Assemblée générale de l’AFAAM, Pierre Benoist se faisait bien sûr un devoir d’être également présent lors des cérémonies d’août où il était toujours très fier de poser auprès de ses camarades pour la traditionnelle photo de famille (ci-dessous au centre). Il nous manquera beaucoup.


André Plagnol nous a quittés

Nous avons appris avec tristesse le décès d’André Plagnol le 24 novembre dernier. Chef de groupe dans la Compagnie Albin, André Plagnol était l’une des figures emblématiques du maquis, un de ces fameux « Cyrards » venus de Paris enseigner l’art de la guerre aux maquisards du Loiret dont je vous invite à découvrir le parcours.

André Plagnol est né le 22 mars 1925. La France est vaincue et occupée lorsqu’il entame la préparation au concours d’entrée à Saint Cyr au Lycée Janson de Sailly, rue de la pompe à Paris. Ces jeunes destinés et préparés à intégrer l’armée représentent alors pour la Résistance d’excellentes recrues. André Plagnol a tout juste 17 ans lorsqu’il entre dans l’ORA (Organisation de résistance de l’armée).

Regroupés dans le Corps Francs Liénart créé par le lieutenant Jean de Montangon (alias « Liénart »), André Plagnol et ses camarades bénéficient d’une préparation accélérée au maniement des armes. Après l’arrestation de leur chef le 3 juin 1944, Albin Chalandon, alors adjoint du lieutenant de Montangon, décide après le débarquement d’envoyer 21 de ces « Cyrards » dans le Loiret en forêt d’Orléans. Dix d’entre eux, dont Albin Chalandon, seront cachés par des fermiers dans les communes environnantes de Lorris, huit autres rejoindront le maquis de Vitry-aux-Loges, trois seront dirigés vers le maquis de Chambon-la-Forêt (voir la page dédiée aux origines du maquis de Lorris).

André Plagnol quitte donc Paris en train pour rejoindre Montargis dans la nuit du 7 au 8 juin 1944. A pied, il se dirige alors avec ses neuf camarades dans la forêt pour rejoindre le Carrefour d’Orléans. Il est ensuite accueilli chez la famille Richard à Coudroy. Depuis sa retraite, André Plagnol est chargé de recruter discrètement puis de former les futurs maquisards. Il participe donc pleinement à la construction et à la structuration du maquis de Lorris.

Vous découvrirez le récit de ces origines du maquis dans le court extrait ci-dessous, tiré du témoignage recueilli en 2014 au Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris, un grand merci à l’équipe du Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris qui nous autorise à diffuser cet enregistrement :

André Plagnol, Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris, janvier 2014 (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris)

Une fois les effectifs réunis en juillet 1944, André Plagnol est affecté à la Compagnie Albin placée sous les ordres d’Albin Chalandon, dans la section du lieutenant René Toulza. Il y est nommé chef de groupe et dirige donc une unité constituée de 10 hommes (voir schéma d’organisation d’une compagnie du maquis de Lorris) qui seront de tous les combats. Le groupe Plagnol fait ainsi partie des renforts envoyés l’après-midi du 12 août 1944 à Chicamour, et sera pleinement engagé dans les combats du 14 août au Carrefour d’Orléans.

Châteauneuf-sur-Loire, 17 juillet 1944, avec de g. à d. Jacques Brodu, Jacques-Henri Cordier, Bernard de Tailly et André Pagnol (Droits réservés, AFAAM)

À la tête de ses hommes, André Plagnol participera également à la libération de Châteauneuf-sur-Loire, d’Orléans, et enfin Paris où la Compagnie Albin chargée de former des têtes de pont sur la rive droite de la Seine sera engagée dans de durs combats pour la prise de la Chambre des Députés et du Ministère des Affaires Étrangères. Écoutons André Plagnol raconter ces événements et les derniers jours du maquis :

Après la dissolution du maquis, André Plagnol poursuit donc son parcours dans l’armée jusqu’en 1947, puis intégrera le monde des finances. En 1997, il est élevé au rang de Chevalier de la Légion d’Honneur, puis promu au rang d’Officier en 2012.

André Plagnol a toujours été très attaché à perpétuer l’histoire du maquis de Lorris, acceptant volontiers comme en 2014 de témoigner sur son parcours et celui de ses camarades en compagnie de celui qui était alors le chef de sa compagnie, Albin Chalandon.

André Plagnol (à gauche) et Albin Chalandon, Mémorial du Maréchal Leclerc de Hauteclocque et de la Libération de Paris, janvier 2014 (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris)

Jean Héau s’en est allé

Jean Héau est parti le 4 mars 2019, il avait 95 ans.

Combien de fois a-t-il rencontré les jeunes de la région et nos collégiens pour leur raconter le maquis de Lorris ! Toujours aux côtés de son camarade Bernard Chalopin, il leur a inlassablement expliqué le contexte de l’époque, l’organisation du maquis, les actions auxquelles il a participé, racontant, en n’en revenant toujours pas si longtemps après, l’incroyable histoire de son entrée en résistance que vous découvrirez ci-dessous.

Il nous manquera beaucoup au collège des Bordes.

Bernard Chalopin entouré des membres du bureau de l’AFAAM venus déposer une plaque sur la tombe de Jean Héau (Droits réservés, AFAAM, 18 mai 2019)
Messieurs Héau et Chalopin lors des cérémonies du 60ème anniversaire de la Libération de Paris (Droits réservés, AFAAM, août 2004)

Jean Héau a tout juste 14 ans en 1937 alors qu’il vient d’obtenir son Certificat d’études. Son père l’encourage à chercher un travail plutôt que de travailler dans la ferme familiale de Vieilles-Maisons-sur-Joudry, et le voilà parti en apprentissage en menuiserie à Lorris, on est en septembre 1937. Lorsque la guerre éclate, Jean a donc 17 ans, il travaille toujours chez un patron comme menuisier et le restera jusqu’à son arrestation en février 1943. Il mettra un peu de temps à comprendre qu’il a été dénoncé par lettre anonyme et accusé d’avoir provoqué le déraillement d’un train dans lequel circulait Pierre Laval, alors Chef du gouvernement de Vichy et qui dispose en France des pleins pouvoirs depuis novembre 1942 ! Interrogé sans ménagement à la prison d’Orléans rue Eugène Vigniat, il ne doit son salut qu’aux démarches entreprises par son père pour obtenir sa libération.

J’ai choisi de remettre en avant ce témoignage de Jean Héau qui raconte aux élèves du collège en 2011 les circonstances rocambolesques qui l’ont vu entrer en résistance, « une histoire de fou » comme il le répétait toujours en racontant cette histoire !

Témoignage recueilli et enregistré par les élèves du Club Résistance 2010/2011 du collège Geneviève de Gaulle Anthonioz des Bordes
Bernard Chalopin et Jean Héau, le 11 mai 2011, au collège

Désormais sans papiers, il entre en clandestinité et intègre dans un premier temps un groupe de l’OCM (Organisation civile et militaire) à Vielles-Maisons avant de rejoindre le chantier forestier au cœur de la forêt d’Orléans où se constitue le futur maquis de Lorris. En entrant dans les rangs du maquis, Jean imite là un certain nombre de jeunes de la région qui refusent l’occupation allemande et se tiennent prêts à prendre les armes.

Comme son complice de toujours, Bernard Chalopin (« Tony »), Jean Héau, alias « Tom », est intégré à la compagnie Albin et appartient au groupe Cordier de la section Toulza (voir schéma), groupe dans lequel il prend en charge le FM (fusil mitrailleur).

Avec ses compagnons d’armes, il sera de toutes les opérations (réquisition de véhicules, réception de parachutage, sabotage du Pont des Beignets le 28 juillet 1944…), et de tous les combats, de la libération de Châteauneuf-sur-Loire à celle de Paris, en passant par Orléans, vous connaissez tous les événements qui rythmeront ces quatre mois de la vie de nos maquisards à l’été 1944.

À la fin de la guerre, alors qu’on lui propose de devenir gendarme, Jean préférera retourner chez lui et reprendre sa vie d’avant, le sentiment du devoir accompli : « On a juste fait ce qu’il y avait à faire » répétait-il toujours…

Jean Héau sera décoré de la Croix du Combattant volontaire de la Résistance en 1992.

Jean Héau aux côtés de ses camarades du maquis lors des cérémonies au Carrefour de la Résistance (Droits réservés, AFAAM, août 2017)

Décès de Maurice Le Noury (18 janvier 2019)

C’est un personnage emblématique et d’une gentillesse incroyable qui disparaît avec Maurice Le Noury. Il n’est pas un ancien du maquis, c’est un para des SAS, mais il vivait à Gien depuis plusieurs années et se faisait un devoir d’être présent à chaque cérémonie de commémoration dans la région, à commencer par les cérémonies du souvenir des victimes de l’attaque du Maquis de Lorris par les Allemands le 14 août 1944, d’où l’hommage que l’AFAAM tenait à lui rendre ici-même. Maurice Le Noury nous a quitté à l’âge de 97 ans, son parcours est remarquable, et c’est avec beaucoup de tristesse que je vous invite à le découvrir.

Maurice Le Noury ici au centre avec son béret rouge, aux côtés de Bernard Chalopin et des anciens du maquis de Lorris, lors de la cérémonie de commémoration de l’attaque du maquis par les Allemands le 14 août 1944 (Droits réservés, AFAAM, 2016)

Né le 27 décembre 1921 à Villegats, Maurice Le Noury a donc 19 ans en novembre 1941 lorsqu’il décide de quitter la France alors occupée par les troupes allemandes. Il franchit la ligne de démarcation clandestinement et se retrouve en zone libre, direction Marseille. Il s’embarque ainsi pour l’Afrique du Nord où il s’engage aussitôt à Alger dans le 1er Régiment de Zouaves de l’Armée d’Afrique.

En juillet 1943, à Tizi Ouzou, le jeune Maurice se porte volontaire pour intégrer le French Squadron du 2nd SAS Regiment, une unité d’élite des forces spéciales des armées britanniques, et subit le dur entraînement des commandos à Philippeville. La mission des SAS, contrairement aux troupes parachutistes classiques, n’est pas d’engager l’armée allemande de front, mais d’opérer sur les arrières de l’ennemi des missions de guérilla, de sabotage et de harcèlement, sans appui, avec des effectifs réduits.

Breveté parachutiste en Angleterre à Ringway en avril 1944, Maurice Le Noury s’entraîne à Ayr et en Écosse, mais ne peut participer aux opérations aéroportées de son régiment en Bretagne, à cause d’une blessure contractée à l’entraînement dans le sud de l’Angleterre, peu de temps avant le Débarquement du 6 juin.

Il pourra néanmoins participer à la mission RUPERT dans la forêt de Bar-le-Duc (Meuse) quelques semaines plus tard, où il est parachuté dans la nuit du 9 au 10 août 1944 avec ses équipiers anglais. Chaque homme est équipé d’un Colt 45, un poignard US et une carabine à crosse repliable ou une mitraillette Sten. Seul français de son stick (une compagnie de combat compte une section de commandement et deux sections de combat à quatre groupes, les sticks), il fera office d’interprète et de relais auprès de la population lors de la libération de Saint-Dizier.

De retour en Angleterre une fois la mission accomplie, il rejoint à l’automne 1944 le 3rd SAS Regiment, ou 3ème Régiment de Chasseurs Parachutistes (3ème RCP) pour les Français. Maurice Le Noury est de nouveau parachuté le 8 avril 1945, cette fois en Hollande dans le cadre de l’opération AMHERST. Les 2nd et 3rd SAS Regiments précèdent le 2ème Corps canadien et doivent créer la confusion chez l’ennemi, l’empêcher d’établir une ligne de défense et préserver les ponts. Maurice Le Noury est alors le radio du lieutenant colonel de Bollardière, et participe à ses côtés à la Libération de Spier. L’opération est un succès, mais les pertes des deux régiments SAS sont lourdes, le 3ème RCP compte à lui seul 12 tués, 40 disparus et 20 blessés.

Maurice Le Noury est démobilisé à Angers le 11 septembre 1945 avec le grade de caporal, et recevra par la suite une multitude de décorations en récompense des services rendus : Chevalier de la Légion d’honneur, Médaille Militaire, Croix de Guerre 39-45 avec citations, Croix du Combattant Volontaire.

Je ne saurais trop vous conseiller la lecture de ses mémoires, rédigées avec l’aide de son ami Gilles Bré, dans l’ouvrage intitulé En suivant mon étoile, mémoires de guerre d’un ancien parachutiste SAS de la France Libre, publié aux Éditions de l’Écluse en août dernier, et que vous trouverez sans peine en vente au Musée de la Résistance et de la Déportation de Lorris qu’il connaissait si bien.


Jean-Pierre Usseglio (décédé en mai 2018)

Jean-Pierre Usseglio est né le 5 novembre 1925 à Paris, il a donc à peine 19 ans lorsqu’il rentre dans la résistance au sein du Maquis de Chambon-la-Forêt. A la suite de l’attaque du maquis par les Allemands le 6 août 1944, il se réfugie avec ses compagnons en forêt d’Orléans et vient grossir les rangs du maquis de Lorris dans lequel il intègre la Compagnie Paul, sous les ordres du Capitaine Gramond. A l’été 1944,  il participe donc à la libération de Châteauneuf/Loire, d’Orléans puis à celle de Paris, aux côtés de ses camarades.

Alors qu’au retour de Paris le maquis gagne la région de la Nièvre et se charge de garder sous contrôle les prisonniers allemands de la colonne Elster, le maquis est dissous. Tandis que nombre de maquisards choisissent de regagner leurs foyers, Jean-Pierre Usseglio rejoint quant à lui le 4th SAS / 2ème RCP à Nevers en septembre 1944, et suit en Angleterre la formation de parachutiste à l’école de saut de Ringway (novembre-décembre 1944), en compagnie d’autres anciens de la Compagnie Paul.

Ces hommes seront du groupe parachuté en Hollande lors de l’opération Amherst en avril 1945, avec pour objectif de capturer intacts des canaux néerlandais, ponts et aérodromes pour permettre ensuite de déferler sur l’Allemagne. Parachutés dans la province de Drenthe, les paras occupent plusieurs ponts et mènent des embuscades contre les troupes allemandes en retraite avant d’être violemment attaqués le 8 avril près de Westdorp. Deux Français sont tués, Serge Levasseur et René Peron,  Jean-Pierre Usseglio est gravement blessé  à la jambe, puis arrêté avec plusieurs de ses camarades. Il échappe de peu à une exécution sommaire avant d’être libéré par les troupes canadiennes.

Rapatrié vers l’Angleterre le 20 mai 1945, Jean-Pierre Usseglio, tourneur-outilleur de formation, devient avocat. En 1948, il doit subir l’amputation de sa jambe blessée en Hollande.

Officier de la Légion d’Honneur, Médaille Militaire, décoré de la Croix de Guerre française 1939-1945 et de la Bronzen Kruis hollandaise, Jean-Pierre Usseglio  s’est toujours tenu à l’écart des commémorations et honneurs que son parcours légitimait pourtant sans contestation, il n’est que justice de lui rendre hommage aujourd’hui.


« Le Marseillais » Étienne Girard s’en est allé (mars 2018)

Étienne Girard (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris)

« Le Marseillais », c’était le pseudonyme d’Étienne Girard au maquis de Lorris. Son accent chantant ne pouvait tromper personne. Il nous a quittés.

Étienne Girard est né à Arles en 1925. Il quitte la cité romaine avec sa famille pour rejoindre le Loiret en 1937. La guerre débute en 1939. Parmi les cinq frères Girard, l’aîné disparaît le le 18 mai 1940, puis un autre frère sera blessé et fait prisonnier. C’est à ce moment là que les trois derniers entrent en Résistance.

En décembre 1943, Étienne Girard, alors âgé de 18 ans, et son plus jeune frère de 15 ans, rejoignent dans un premier temps le maquis de l’Etang-neuf à Charny dans l’Yonne.

Une quarantaine de maquis se sont implantés dans l’Yonne en 1943 et 1944. Le plus important est celui de l’Etang-neuf du réseau Jean-Marie Buckmaster, dont le PC était implanté depuis mai 1944 dans l’Aillantais, et fort d’une centaine de combattants en juillet 1944. Dépendant directement du SOE (Special Operations Executive) et disposant d’importants moyens en armes, les maquisards y ont mené des embuscades contre les soldats allemands. Fin juillet, repéré par les Allemands, le maquis doit être évacué. 

En juillet 1944, les frères Girard font partie de ces résistants qui se réfugient en forêt d’Orléans et viennent grossir les rangs du maquis de Lorris (Compagnie Albin, groupe de Laubier). En 1944,  Étienne Girard participe donc à la libération de la Ville d’Orléans puis à celle de Paris, aux côtés de leurs camarades.

C’est 1956 qu’il reviendra sur Arles, ville dans laquelle il n’a cessé depuis de témoigner auprès des élèves des établissements scolaires, jusqu’à trente fois par an ces dernières années, pour raconter inlassablement son histoire aux plus jeunes, pour leur transmettre le flambeau,  et les valeurs de la Résistance.

E Girard, Arles, 2013
Lors de la cérémonie du 69e anniversaire de la Libération d’Arles, Étienne Girard a reçu des mains d’Éliane Mezy, les insignes de Chevalier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur.

Décoré de la Croix du Combattant volontaire de la Résistance en 1988,  Étienne Girard s’est également vu remettre lors du 69ème anniversaire de la libération d’Arles en 2013 les insignes de Chevalier dans l’Ordre National de la Légion d’Honneur. Les plus assidus qui suivent notre actualité se rappelleront l’article qui lui a été consacré sur notre site à cette occasion.

Étienne Girard revenait régulièrement dans la région, malgré la distance, assister à l’Assemblée générale de l’AFAAM ou visiter le musée de la Résistance et de la Déportation de Lorris qu’il connaissait par coeur, pour rencontrer les anciens, auprès desquels il était toujours très fier de poser pour la photo de famille. Il se faisait bien sûr un devoir d’être également présent lors des cérémonies commémoratives du mois d’août.

(de g. à d.) : Jean Héau, Robert Turpin, Jacques Blain, Bernard Chalopin, Étienne Girard et Pierre Benoist (Droits réservés, AFAAM, Lorris, 14 mai 2017)
(de g. à d.) : Etienne Girard, Jean Héau, Jacques Blain, Pierre Benoist, Robert Turpin, Bernard Chalopin, Robert Gérard (Droits réservés, AFAAM, Carrefour de la Résistance, 13 août 2017)

Avec Étienne Girard, c’est une nouvelle part de l’histoire du maquis qui s’en va, il nous manquera à tous. Lors de ses obsèques à Arles le 20 mai 2018, Bernard Chalopin, ancien maquisard de la Compagnie Albin également, n’a pas manqué dans un dernier message lu devant l’assistance réunie à l’Hôtel de Ville, de rappeler le courage et l’engagement inaltérables de son compagnon d’armes (voir article dédié Arles-info).

Un hommage a également été rendu à Étienne Girard le 3 octobre 2018, l’occasion pour l’AFAAM de déposer une plaque à sa mémoire sur sa tombe, dans le cimetière de Trinquetaille. Le Centre de la Résistance et de la Déportation d’Arles et du pays d’Arles n’a pas manqué de rappeler l’investissement de « celui qui n’a cessé jusqu’au bout de vouloir témoigner de ses combats pour la liberté auprès des élèves d’Arles et du pays d’Arles ». C’est sur l’air « Le temps des cerises » cher à Étienne Girard que sa famille, les représentants de l’AFAAM et des élèves du collège Morel (qui l’avaient rencontré il y a quelques mois et étaient passés par le Musée de la Résistance et de la Déportation de Lorris), se sont longuement recueillis avant de déposer leurs gerbes de fleurs, puis d’écouter l’enregistrement d’une de ses interventions à l’espace Mistral.

Étienne Girard (Droits réservés, AFAAM, Lorris, 14 mai 2017)

Guy de Bodman (décédé en août 2017)

Trail des maquisards 2017 (Droits réservés, AFAAM, 2017)

Nos anciens auront eu une pensée toute particulière en ce mois d’août 2017 pour l’un des leurs décédé, Guy de Bodman (96 ans). Un hommage poignant lui a été rendu lors du traditionnel trail des maquisards le 19 août 2017, quelques jours après sa mort. Son parcours épouse au plus près le destin des maquisards de Lorris puisqu’il sera de tous leurs combats.

Remise de médailles commémoratives par le sous-préfet de Montargis Paul Laville aux 8 anciens du maquis pour le 70ème anniversaire en 2014, Bernard Chalopin, Jean Héau, Robert Turpin, Michel Deprecq, André Rousseau, Jacques Blain, Robert Gérard et ici Guy de Bodman (Droits réservés, AFAAM, 10 août 2014)

Prisonnier de guerre au moment de la débâcle en 1940, Guy de Bodman s’évade avant d’entrer en résistance. Il se fait d’abord recruter par le Corps Franc Vengeance avant d’intégrer le maquis de Lorris le 1er août 1944. En temps que chef de section de la compagnie Albin, il participe aux combats de Chicamour le 12 août 1944 avant d’affronter de nouveau les Allemands deux jours plus tard lors de l’attaque du maquis le 14 août.

Il suivra ensuite la route des maquisards de Châteauneuf-sur-Loire à Orléans, et jusqu’aux combats pour la libération de Paris, les 24, 25 et 26 août 1944 : alors que la Compagnie Robert et la Compagnie Paul préparent l’attaque de l’Ecole Militaire, avec à leur tête le colonel O’Neill, la Compagnie Albin de Guy de Bodman est chargée de former des têtes de pont sur la rive droite de la Seine, du Pont de l’Alma à celui de la Concorde. Elle sera ensuite engagée dans de durs affrontements pour la prise de la Chambre des Députés et du Ministère des Affaires Etrangères.

De retour dans la région, Guy de Bodman participe aux derniers combats pour la libération de la Nièvre en septembre 1944 avant de s’engager à la dissolution du maquis dans le 2ème régiment de Hussards aux côtés du lieutenant-colonel Marc O’Neill.


Michel Deprecq en compagnie de sa future épouse, se remet de sa blessure après Chicamour (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Michel Deprecq est décédé le 5 février 2017, il avait 93 ans

Michel Deprecq, originaire du Nord, s’est retrouvé instituteur à Bouzy-la-forêt après la débâcle, forcé de fuir Calais devant l’avancée allemande. Recruté dans le maquis de Lorris avec son frère Lucien en juillet 1944, Il s’entraîne dans la compagnie Robert au maniement du FM (fusil-mitrailleur), et fait partie des 2 sections de maquisards engagés dans l’embuscade de Chicamour, le 12 août 1944, baptême du feu au cours duquel il est gravement blessé. Il sera décoré de la Croix du Combattant Volontaire de la Résistance en 1993.

Pour relire le témoignage de Michel Deprecq de l’attaque de Chicamour du 12 août 1944


André Rousseau (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

André Rousseau est décédé le 8 avril 2017, à l’âge de 94 ans

Originaire de Thimory, il entre en résistance en février 1944, dans l’OCM (Organisation civile et militaire), groupe de Montargis, avant d’incorporer le maquis de Vitry aux Loges. Il intègrera ensuite le maquis de Lorris après l’attaque des Allemands contre le maquis de Vitry le 17 juillet 1944. Il fait alors partie de la compagnie Albin, groupe Renaud, et participe à toutes les missions : embuscades des Bordes le 6 juin 1944, Bellegarde le 15 juin, le pont des Beignets le 29 juillet. Il participe également au combat de Chicamour le 12 aout avec Michel Deprecq, et affronte les Allemands du régiment de sécurité 1010 près du Carrefour d’Orléans le 14 août. Il sera de toutes les batailles qui suivront, participant activement à la libération de Châteauneuf sur Loire, puis Orléans et enfin Paris.

Membre actif de l’AFAAM, il participait sans relâche aux cérémonies commémoratives du Carrefour aux côtés de ses camarades.

André Rousseau (3ème en partant de la gauche) et Michel Deprecq (6ème) à la dernière cérémonie du Carrefour le 14 août 2016 (Droits réservés, AFAAM, 2016)

Le général (C.R.) Jacques de Veyssière est décédé le 7 février 2017, à l’âge de 92 ans

C’était un ancien « Cyrard », intégré au maquis de Lorris au printemps 1944, et devenu est un des chefs de groupe de la compagnie Albin. Il était commandeur de la Légion d’Honneur et de l’ordre National du Mérite.


Maurice Péron (décédé en janvier 2017)

Maurice Péron était un maquisard de la Compagnie Robert. Il s’était engagé à… 16 ans ! Vous pourrez consulter sa fiche au Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris


Charles Léger à la fin de la guerre (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Charles Léger est décédé le 13 novembre 2016, à l’âge de 93 ans

Originaire de Dampierre-en-Burly, il intègre le maquis de Lorris au printemps 1944 dans la compagnie Robert. Il se distingue lors de l’attaque du 14 août 1944, en posant huit mines antichars au carrefour du chêne coquetier pour retarder les allemands. Il participe ensuite aux les combats pour la libération de Châteauneuf-sur-Loire, d’Orléans et de Paris. A la dissolution des maquis, en septembre 1944, Charles Léger choisi d’intégrer la première Armée (Rhin et Danube) du général de Lattre de Tassigny, et participe alors activement aux campagnes d’Alsace et d’Allemagne jusqu’à la capitulation allemande. Il est médaillé de la Croix du Combattant 1939-1945.

Pour relire le témoignage de Charles Léger à propos des victimes d’Ouzouer-sur-Loire

Pour revoir son témoignage de l’attaque du 14 août 1944


Renée Elise est décédée le 27 octobre 2016, elle avait 90 ans

Les Barnabés, famille Elise, PC de Chalandon (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Originaire de Belgique, c’est toute la famille Elise qui est venue s’installer à la ferme des Barnabés à Lorris. Dès le débarquement en juin 1944, de nombreux volontaires recrutés pour constituer des groupes de résistance en forêt d’Orléans, passent par les Barnabés. Parmi eux, Albin Chalandon, membre de l’ORA (Organisation de résistance de l’armée), est chargé par le colonel Marc O’Neill, responsable du secteur, de rassembler tous les volontaires de la région de Lorris : les hommes sont recrutés dans les communes de Nogent sur Vernisson, Montereau, Noyers, Le Moulinet, Vieilles Maisons, Thimory… Certains sont intégrés à l’ORA (Organisation de la Résistance Armée), les autres au « Corps Franc Liénart ». Dans la clandestinité, ils reçoivent une instruction militaire sur le maniement des armes et des explosifs. Albin Chalandon installe alors son PC dans la ferme des Barnabés. C’est de là que seront organisés de nombreux parachutages et sessions d’entraînement des volontaires, là où sont hébergés de nombreux résistants malgré les énormes risques encourus par la famille Elise, qui prendra également en charge le ravitaillement des hommes.


Jean Frémont (en gris) sur le chantier forestier (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation, Lorris)

Jean Frémont nous a quittés le 1er septembre 2016, à l’âge de 94 ans.

Originaire d’Amboise, il habite Orléans lorsqu’il décide d’ignorer sa convocation au STO (Service du Travail Obligatoire) Grâce à de faux papiers d’identité, il rejoint comme bon nombre d’autres réfractaires le chantier forestier du Carrefour d’Orléans où il travaille avec René Charton, en contact direct avec les maquisards de Lorris. Il est trahi par un agent infiltré de la Gestapo au chantier, René Rebours, alias Jacques Collinet, qui le fait arrêter alors qu’il passe un message sur Orléans. Interrogé et torturé au siège de la Gestapo aux numéros 47-48 du boulevard Alexandre Martin à Orléans, il est d’abord transféré à la prison allemande de la rue Eugène Vignat avant d’être affecté sur la base sous-marine de Lorient où il doit travailler pour les Allemands. Il s’évade une première fois, est repris, mais la seconde tentative sera la bonne. Il pourra rentrer à Orléans peu avant la Libération en août 1944.


Paul Jacquemart (décédé en mai 2016)

Paul Jacquemart (né en 1927) est un ancien maquisard de la Compagnie de réserve (voir article dédié à l’organisation du maquis). Il sera arrêté par la Gestapo à Orléans. Il est décédé à l’âge de 89 ans. Vous pourrez consulter sa fiche au Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris.


Décès du Colonel Claude Morraglia, ancien cyrard du maquis de Lorris et déporté à Buchenwald (janvier 2016)

Le Colonel Claude Morraglia (né le 1er janvier 1923 à Metz) est décédé dans la nuit du 12 au 13 janvier 2016, à l’âge de 93 ans.

Claude Morraglia est un cyrard, un de ces jeunes étudiants, élèves officiers de l’armée française du lycée militaire de Saint-Cyr au Lycée Janson-de-Sailly à Paris, transféré dans un premier temps à Aix-en-Provence en octobre 1940 puis fermé en 1942. Claude Morraglia est recruté par un ancien officier instructeur, le capitaine de Montangon (alias « Liénart ») de l’ORA, l’Organisation de Résistance de l’Armée. Il entre ainsi en résistance et arrive à Montargis le 7 juin 1944 en compagnie d’autres jeunes cyrards. Tous sont d’abord cachés dans des fermes aux environs de Lorris et commencent le recrutement de jeunes volontaires autour de la commune.

Claude Morraglia décoré de la Légion d’Honneur en 1979 (Droits réservés, Musée Départemental de la Résistance et de la Déportation de Lorris)

Claude Morraglia intègre rapidement le maquis de Lorris et devient chef de groupe dans la Compagnie Albin. Il met à profit sa formation militaire pour entraîner les jeunes recrues au maniement des armes et des explosifs. Son groupe participe pleinement aux actions entreprises à l’été 1944, en particulier les missions de sabotage de ponts et de voie ferrées. C’est paradoxalement lors d’une mission a priori moins risquée qu’il sera arrêté le 14 juillet 1944. Le maquis avait besoin de véhicules pour mener ses missions et n’hésitait pas à en réquisitionner auprès des habitants de la région (je vous renvoie à l’inénarrable épisode de la traction du curé de Varennes à laquelle a participé Bernard Chalopin et raconté dans Les Sangliers sortent du bois !). Le propriétaire de la traction en question à Lorris refusa catégoriquement de céder son véhicule et alerta une patrouille de gendarmes français. Ceux-ci mirent aussitôt Claude Morraglia en état d’arrestation avant de l’incarcérer à la prison de Montargis. Le 21 juillet, il est remis à la Feldgendarmerie. Dès le lendemain, il passe sous la responsabilité de la Gestapo d’Orléans qui le livrera aussitôt à une série d’interrogatoires musclés…

Devant son mutisme, l’occupant décide alors de transférer Claude Morraglia au camp de Compiègne-Royallieu le 28 juillet. Il sera finalement déporté au camp de Buchenwald le 17 août. Il y reçoit le matricule 78706 et est affecté au kommando de Neu-Stassfurt. Avec ses codétenus, il travaille alors plusieurs mois dans une usine souterraine d’armement (une ancienne mine de sel reconvertie). Il tiendra 8 mois ainsi dans des conditions épouvantables avant d’être libéré en compagnie des autres survivants le 8 mai 1945 à Annaberg.

Claude Morraglia, contrairement à bon nombre d’anciens maquisards retournés à la vie civile à la fin de la guerre, poursuivra logiquement sa carrière militaire entamée à Saint-Cyr et sera donc de tous les combats de l’armée française dans les colonies d’Indochine puis d’Algérie. Il y gagnera ses galons de colonel.

Claude Morraglia sera décoré le 5 septembre 1979 de la plaque de Grand Officier de la Légion d’Honneur par le président de la République en personne, Valéry Giscard d’Estaing. Les honneurs militaires lui ont été rendus pour ses obsèques le 19 janvier 2016, dans la collégiale Notre Dame d’Ecouis (Eure).